Au début, tout semblait ordinaire. C’était une journée d’été comme les autres dans notre petit village niché entre les collines. Le soleil tapait doucement sur les feuilles de tomates, les oiseaux chantaient, et l’odeur de la terre fraîchement retournée remplissait l’air.
Ma belle-mère, Irène, était venue passer quelques jours chez nous. Elle disait vouloir «se reconnecter avec la nature» et «aider au jardin». Je savais qu’elle ne m’appréciait guère, mais j’ai accepté sa visite par respect pour mon mari, Paul. Après tout, c’était sa mère. Et puis, que pouvait-il bien arriver dans un simple potager ?

Le premier jour, Irène passa son temps à critiquer nos méthodes de culture, notre compost, l’emplacement des salades, et même la forme de nos concombres. Rien n’était à son goût. Le deuxième jour, elle s’enferma longtemps dans la cabane au fond du jardin, disant qu’elle avait besoin de «méditer en paix». C’est à ce moment que les choses ont commencé à devenir étranges.
Le matin suivant, alors que je m’apprêtais à arroser les courgettes, j’ai vu que quelqu’un avait creusé un trou profond derrière les rangées de carottes. Pensant d’abord à un animal, je m’en suis approchée. C’est alors que je l’ai vu.
Un tissu. Pas n’importe lequel : une étoffe ancienne, brodée à la main, recouverte de terre humide. Je l’ai tirée. Elle enveloppait quelque chose. Mon cœur s’est figé.
À l’intérieur, il y avait une petite boîte en bois, verrouillée. L’odeur qui s’en échappait était étrange — un mélange de moisi, de métal rouillé et… autre chose. Quand Paul est arrivé, il a réussi à l’ouvrir avec un tournevis.
Nous avons découvert des cheveux humains, une vieille photo noir et blanc d’un enfant inconnu, et une lettre rédigée dans une écriture tremblante. Elle parlait de secrets, de trahison, et d’une promesse non tenue. La signature était celle de la sœur décédée d’Irène — dont elle ne parlait jamais.
Paul a pâli. Il m’a regardée comme s’il me voyait pour la première fois. « C’est… impossible », a-t-il murmuré.
Nous avons confronté Irène le soir même. Elle s’est mise à trembler, à pleurer, puis elle a crié : « Vous n’auriez jamais dû creuser là. Ce secret devait rester enterré. »
Depuis ce jour, rien n’a été pareil. Le jardin est resté à l’abandon. Les légumes ont pourri sur place. Et Irène n’a plus jamais remis les pieds chez nous.
Mais parfois, les nuits d’orage, on entend encore des pas près de la cabane…