Dans les profondeurs étouffantes d’un marécage d’Asie du Sud-Est, Marc Delcourt, photographe animalier en mission pour un reportage sur la faune menacée, avançait prudemment. Chaque pas s’enfonçait dans la vase, chaque souffle semblait faire vibrer les feuilles moites suspendues au-dessus de lui. Puis, un cri — à peine un miaulement — attira son attention. À moitié enfoui dans l’eau brune, un petit tigre, visiblement épuisé, luttait pour garder la tête hors de la surface.
Sans réfléchir, Marc se jeta à genoux dans la boue, saisissant délicatement le petit corps tremblant. Les griffes du tigreau s’agrippaient faiblement à sa manche, son souffle court, ses yeux suppliants. Il le hissa contre lui, le cœur battant, déjà imaginant les soins qu’il faudrait lui prodiguer. Ce qu’il ne savait pas, c’est que chaque seconde passée dans cette étreinte mettait sa propre vie en jeu.

Derrière lui, au cœur de la brume, une silhouette s’était formée. Silencieuse, mais massive. Deux yeux dorés fixaient la scène avec intensité. Le silence de la jungle fut rompu par un grondement sourd, primal, porteur d’un avertissement clair. La mère du petit était là.
Instinct maternel contre instinct humain. Dans cette fraction de seconde suspendue, Marc comprit que dans la jungle, rien n’est jamais simple. Le sauvetage venait à peine de commencer — et il était peut-être déjà trop tard.