« Là où le corps est propriété de l’État : Les traditions étranges et terrifiantes de la Corée du Nord qu’on ne vous raconte pas à la télévision »

Quand on entend parler de la Corée du Nord, on imagine les terrains de parade de Pyongyang, les rangs ordonnés de soldats, les femmes souriantes en hanboks colorés et l’éternel portrait de Kim Il-sung sur la façade de chaque bâtiment. Mais derrière cette vitrine théâtrale se cache un monde où chaque pas, chaque respiration, et même le corps humain, n’appartiennent pas à l’individu, mais au système. Là où les frontières familières entre privé et public s’estompent au point d’être indiscernables, naissent des coutumes qui semblent non seulement étranges, mais aussi troublantes par leur froide rationalité.

L’un de ces phénomènes est celui des examens médicaux de masse réguliers des jeunes femmes. Des photos divulguées en ligne montrent des centaines de jeunes filles assises en rangs parfaits. Leurs visages sont inexpressifs, leur posture impeccable, le regard fixé vers l’avant – comme si elles étaient sélectionnées non pas pour un emploi, mais pour un rôle dans une pièce intitulée « Le citoyen parfait ». À première vue, c’est la discipline. Mais derrière cette « discipline » se cache non pas un souci de santé, mais un mécanisme de contrôle total.

Selon les témoignages de transfuges, ces contrôles sont obligatoires pour les étudiantes et les candidates à des postes gouvernementaux. Officiellement, ils visent le « bien-être physique » des futurs cadres. En réalité, il s’agit d’un outil de sélection, dont les critères sont déterminés non par la médecine, mais par l’idéologie. Il est même arrivé que les résultats soient utilisés pour nommer des femmes à des postes gouvernementaux « spéciaux », par exemple dans des secteurs au service de l’élite.

Il ne s’agit pas de médecine, mais d’une scène de pouvoir. L’examen devient un acte de soumission, où le corps d’une femme devient un objet de plus à la disposition de l’État. Refuser est impossible. Se soustraire au contrôle, c’est éveiller les soupçons, et en Corée du Nord, la suspicion équivaut à une condamnation à mort.

Certaines participantes ont raconté plus tard comment on leur a inculqué le message suivant : « Votre corps appartient à la Patrie. Il doit être pur, fort et digne de la servir.» Cette phrase résume l’essence même du système. Ici, pas de « je », seulement un « nous », et même ce « nous » est contrôlé d’en haut.

Mais les examens médicaux ne sont qu’un élément d’un ensemble de coutumes bien plus vaste, reflet de l’idéologie de l’État. Par exemple, le port d’insignes à l’effigie des dirigeants est obligatoire. Perdre un insigne n’est pas une bagatelle, c’est un crime. Les gens les nettoient tous les jours comme si leur vie en dépendait. En un sens, c’est le cas.

Il existe un autre rituel : lors des anniversaires de la mort des dirigeants, les habitants sont tenus de rester immobiles pendant plusieurs minutes, souvent sous un soleil de plomb ou une pluie battante. Les gens pleurent, certains s’évanouissent, mais personne n’ose bouger. Même les larmes doivent être convenables : sincères, mais pas trop fortes. Dans un pays où les émotions sont régulées, la sincérité devient une forme de discipline.

Même les mariages et les funérailles sont soumis à un contrôle idéologique. Musique, photographies, nombre d’invités : tout est soumis à des règles. Même la mariée n’a pas le droit de porter une robe blanche si elle évoque la culture occidentale. Au lieu de cela, un portrait du dirigeant s’impose au mur – témoin silencieux du bonheur sanctionné par l’État.

Les observateurs soulignent que de telles pratiques ne sont pas simplement une manifestation de dictature, mais une façon de nourrir un type d’individu particulier. Privé d’intimité, mais convaincu que l’obéissance est la norme. Lorsqu’on vit dans un monde où tout est prescrit, même les bizarreries cessent de paraître étranges. Et c’est peut-être là le plus terrifiant.

La question n’est pas de savoir pourquoi la Corée du Nord est ainsi, mais combien de temps l’esprit humain peut-il persister dans un état de tromperie constante sans s’en apercevoir. Où s’arrête la peur et où commence l’habitude ? Où se situe la frontière entre l’idéologie et la foi ?

À regarder ces filles sur la photo – identiques, silencieuses, alignées –, on a l’impression que le temps s’est arrêté. Mais ce n’est peut-être pas le temps qui s’est arrêté, mais les gens. Elles ont tout simplement cessé d’exister en tant qu’individus.

Et puis on réalise : les coutumes les plus étranges de la Corée du Nord ne sont ni les défilés ni les inspections. Ils sont la vie elle-même, transformée en une cérémonie d’obéissance.

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