Le crépitement du feu ressemble presque à un rire sec, rauque, moqueur. En bas, près de l’entrée, des gens crient et agitent les bras, mais Jermaine ne les regarde plus. Il s’agrippe au rebord métallique du balcon voisin et se hisse, ignorant la douleur lancinante à sa hanche. Quatorze étages plus haut se trouve l’appartement de sa mère. Et chaque seconde s’étire comme une éternité.

La fumée sent le caoutchouc brûlé et la suie, parfois comme un plastique âcre. La lumière des flammes vacille sur les vitres, et l’immeuble semble cracher du feu. Des sirènes retentissent à l’intérieur ; les pompiers tentent d’entrer, mais la police bloque l’accès. L’ascenseur est à l’arrêt. Les escaliers sont bloqués. Des gens hurlent. Et il grimpe.
Au cinquième étage, ses mains se mettent à trembler. Il entend une voix d’en bas : « Hé, mec, descends ! C’est trop dangereux !» Mais il n’a pas le temps d’écouter. Tout comme il ne s’entend pas lui-même – cette voix intérieure qui, au fond de lui, murmure encore : « Qu’est-ce que tu fais ?… » La détermination étouffe le doute.
À chaque mètre, l’air se réchauffe, la chaleur lui serre la peau. Les balcons semblent brûlants – les rambardes métalliques lui brûlent les paumes. Et pourtant, il ne s’arrête pas. La colère contre le destin, la peur pour sa mère, le souvenir de sa voix douce – tout se confond en un seul but. Il continue de grimper.
Au neuvième étage, quelque chose d’étrange se produit : un homme sur le balcon lui tend soudain une bouteille d’eau. « Tiens, vas-y ! Tu peux le faire !» Jermaine saisit la bouteille et s’asperge les mains d’eau, éprouvant un bref soulagement, presque douloureux. Et c’est une fausse alerte : il semble sur le point de s’essouffler, de craquer et de retomber. Mais au lieu de cela, quelque chose en lui se transforme – il accélère.
Il lui reste trois étages. Ses doigts le font souffrir. Ses épaules le brûlent. Son cœur bat la chamade. Et pourtant, il continue de grimper. Il atteint le quinzième étage. Il arrache le cadenas de la grille avec une pince coupante. Il entre. L’appartement est sombre et enfumé, mais sa mère est enchaînée au lit – vivante, terrifiée.
« Tu es venu… »
« Bien sûr que je suis venu. »
« Je pensais… »
« Je sais. »
Et sur ce mot, la phrase s’interrompt, comme si l’air lui-même hésitait à livrer son sens immédiatement.
Il l’aide à se relever, la soutient, la conduit sur le balcon. En bas, les projecteurs et les échelles des pompiers sont déjà déployés. Il ne la traîne pas de la même manière ; il la confie aux pompiers, et ce n’est qu’alors qu’il entame sa propre descente de la façade, car l’ascension est le chemin de l’espoir, et la descente celui de la preuve.
Lorsqu’il descend, la foule est déjà au courant. Quelqu’un filme. Quelqu’un sanglote. Quelqu’un murmure : « Un super-héros… » Mais il ne les regarde pas ; son regard est fixé sur les fenêtres du quinzième étage où se trouve maintenant sa mère.
Puis il esquisse un sourire sans joie : « Je ne suis pas un super-héros. Je ne supportais tout simplement pas d’être là-bas.» Et cette phrase est trop humaine, trop simple, pour être contestée.
Quelques jours plus tard, on le surnomme le Spider-Man de Philadelphie. Les journaux parlent de son exploit. Les chaînes d’information diffusent des images de lui escaladant des balcons. Mais au milieu de toute cette agitation, la scène la plus importante reste celle où il gravit, pas à pas, le mur en flammes, surmontant la peur, la douleur et le vertige.
Le crépitement du feu qui accompagnait son ascension résonne désormais différemment, comme la toile de fond d’une histoire où un homme s’élève au-dessus des flammes. Car un jour, il commença à s’élever, sans regarder en bas.