L’aéroport Charles de Gaulle bourdonnait comme une ruche en fin d’après-midi. Entre les annonces de vols, les valises qui roulent sur le sol lustré, et les passagers pressés, personne ne faisait attention au petit chien brun attaché à un banc près de la porte 42B.

Personne… sauf lui.
Il s’appelait Tango. Un cocker au regard inquiet, aux oreilles tombantes, immobile mais tendu comme un arc. Ceux qui passaient pensaient qu’il attendait son maître, sagement. Mais ce que personne ne voyait, c’était que Tango tremblait. Et qu’il avait commencé à aboyer. Fort. De manière répétée. Presque comme s’il criait quelque chose.
Une hôtesse s’approcha, haussa les épaules :
— Pauvre bête. Il n’aime pas être seul, voilà tout.
Elle avait tort.
Le chien tirait sur sa laisse, fixait avec insistance une valise abandonnée non loin de là. Une valise noire, sans étiquette, posée contre une colonne. Elle ne bougeait pas, ne faisait aucun bruit… mais Tango, lui, n’en détachait pas les yeux.
Un agent de sécurité passa, jeta un regard distrait au chien, puis à la valise. Il ne remarqua rien de suspect. Et continua son chemin.
Les aboiements de Tango devinrent plus frénétiques. Il grognait, tournait en rond, grattait le sol, comme s’il voulait empêcher quelque chose. Comme s’il sentait… le compte à rebours.
Mais les minutes passèrent.
Et à 17h43, la valise explosa.
L’onde de choc fut brutale. Plusieurs personnes furent blessées. Les vitres volèrent en éclats. Le chaos s’installa. Tango, le chien qui avait senti le danger avant tout le monde, fut retrouvé sous les débris, gravement blessé.
Il survécut.
Et son comportement attira l’attention des enquêteurs. Grâce à lui, une autre bombe, cachée plus loin dans l’aéroport, fut désamorcée à temps.
Aujourd’hui, Tango vit avec un pompier qui l’a secouru ce jour-là. Il a une médaille, un coussin moelleux, et une gamelle toujours pleine. Mais parfois, il se met à aboyer soudainement dans son sommeil. Et son nouveau maître sait :
Ce n’est pas un simple chien. C’est celui qui savait. Trop tôt. Trop seul.