Pour Élodie, partir seule en randonnée dans les montagnes des Pyrénées était un rêve de longue date. Passionnée de nature, amoureuse du silence des forêts et des paysages sauvages, elle s’était longuement préparée à ce voyage. Tente légère, provisions, GPS, spray anti-ours – tout avait été minutieusement planifié. Mais rien ne pouvait la préparer à ce qu’elle allait vivre.
Le troisième jour de son périple, elle s’éloigna légèrement du sentier balisé pour chercher un endroit plus isolé où installer son bivouac. Le soleil déclinait doucement, les oiseaux se taisaient peu à peu, et une étrange quiétude enveloppait la forêt. C’était beau. Trop beau, peut-être.

Alors qu’elle était en train de remplir sa gourde près d’un petit ruisseau, un craquement retentit derrière elle. Élodie se figea. Un second bruit, plus fort. Quand elle se retourna, son cœur s’arrêta un instant.
À moins de vingt mètres d’elle, un ours brun massif la fixait. Il n’était pas agressif, pas encore. Mais il était là. Immobile. Présent. Bien réel.
Les secondes suivantes lui parurent durer une éternité. Tous ses réflexes, tout ce qu’elle avait appris dans ses lectures, lui revinrent en mémoire. Ne pas courir. Ne pas crier. Ne pas le regarder droit dans les yeux. Lentement, elle recula, sans quitter l’animal du regard. Mais l’ours fit un pas vers elle.
Son souffle devint court. Elle sentait la panique monter. Elle glissa la main dans sa poche pour attraper le spray répulsif. L’ours s’approchait encore. Il ne semblait pas effrayé, seulement curieux. Ou affamé.
Dans un ultime geste, Élodie pulvérisa le spray entre elle et l’animal. Un grognement sourd retentit. L’ours fit un bond en arrière, renifla, puis tourna lentement la tête. Quelques secondes plus tard, il disparaissait entre les arbres.
Élodie resta figée, incapable de bouger, des larmes silencieuses coulant sur ses joues. Elle venait de frôler la mort. Ce qui devait être une aventure spirituelle en pleine nature s’était transformé en l’une des expériences les plus terrifiantes de sa vie.
Ce soir-là, elle ne monta pas sa tente. Elle marcha, sans s’arrêter, jusqu’au poste de secours le plus proche.
Aujourd’hui, elle raconte cette histoire avec calme, mais aussi avec une émotion encore vive. Le respect qu’elle ressent désormais pour la nature sauvage est infini. Car elle sait, mieux que personne, que dans la forêt, c’est l’homme qui est l’invité — et qu’un rêve peut, en un instant, devenir cauchemar.