Dans le petit hameau de Montregny, niché entre les collines brumeuses du sud de la France, il y avait une histoire qu’on n’osait raconter qu’à voix basse, surtout quand le vent se levait au crépuscule.

Lucien Morin était parti un matin d’octobre 1996, sac sur l’épaule, en disant qu’il allait chercher du travail à la ville. Il n’est jamais revenu. Sa mère l’a attendu pendant des années. Ses amis ont cessé de poser des questions. Et peu à peu, tout le monde a accepté l’évidence : Lucien était mort. Un accident, une disparition… ou pire. Mais il n’y avait ni corps, ni message, ni adieu.

Vingt-sept ans plus tard, une silhouette est apparue sur le sentier de pierre qui mène à l’église du village. Les rares habitants qui passaient là se sont figés. L’homme avait les cheveux longs, la barbe blanchie, et portait le même blouson usé que le jeune Lucien. Mais ses yeux… n’étaient plus les mêmes.

Il ne parlait pas beaucoup. Il s’est installé dans la vieille maison de sa mère, morte depuis longtemps. Et dès la première nuit, les lumières dans la rue ont commencé à vaciller. Les chiens refusaient d’aboyer. Les enfants se mettaient à pleurer dans leur sommeil, sans raison.

Une semaine après son retour, le clocher de l’église s’est mis à sonner à minuit pile — alors qu’aucun mécanisme n’était censé fonctionner depuis des années.

Les anciens du village disaient : « Ce n’est plus Lucien. Ou du moins… pas entièrement. »

Certains prétendent l’avoir vu parler seul, dans une langue que personne ne comprenait. D’autres affirment que sa maison reste allumée toute la nuit, et qu’une ombre passe derrière les rideaux — alors qu’il vit seul.

Aujourd’hui encore, personne ne sait où il était toutes ces années. Ni pourquoi il est revenu. Mais une chose est sûre : depuis ce jour, Montregny n’a plus jamais été un village comme les autres.