Trois jours de pur bonheur virèrent au cauchemar, au point que même les médecins eurent du mal à croire que les bonbons en étaient la cause.

Une boule se forma dans son estomac, comme si de la colle s’y était répandue. Nathan était assis au volant de son camion, le front appuyé sur le volant. Il tenait entre ses mains une boîte en plastique vide étiquetée Haribo Cola Jelly. 3 kilos. Six livres et demie. Il ne restait presque plus rien, seulement l’odeur collante de caramel et de « cola » chimique, imprégnée dans l’habitacle comme un avertissement écrit avec du sucre.

Il n’était pas particulièrement gourmand. C’est juste que la route était longue, l’autoroute ennuyeuse, et ces bonbons à mâcher lui semblaient une échappatoire inoffensive à la solitude. Les premières poignées furent un pur délice : un croquant agréable, une joie un peu sucrée. Mais le soir du deuxième jour, son corps commença à lui envoyer des signaux d’alarme : une lourdeur inexplicable, des sueurs, des mains tremblantes. « J’ai trop mangé », pensa-t-il. Et pourtant, il rouvrit la boîte.

Le troisième jour, la douleur le frappa de plein fouet, comme si on l’avait poignardé de l’intérieur. Une forte pression lui étreignit l’estomac et sa respiration devint superficielle. Des gouttes de sueur glacée ruisselaient sur son dos. Il sortit en titubant du taxi, appela une ambulance et parvint seulement à dire : « J’ai juste mangé des bonbons. »

À son arrivée à l’hôpital, les infirmières échangèrent un regard : sa tension était extrêmement élevée et son front était couvert de sueur froide. On pensa d’abord à un empoisonnement. Mais les analyses révélèrent quelque chose d’étrange : le taux de gélatine dans son organisme était si élevé qu’une partie de ses intestins avait littéralement gelé.

« Avez-vous mangé quelque chose d’inhabituel ? »

« Juste des choses à mâcher… beaucoup… » balbutia-t-il.

« Combien ? » « Beaucoup ? »

« Trois kilos. En trois jours. »

Le silence s’éternisa. Même le médecin, pourtant habitué aux urgences, ne sut que dire.

Après le scanner, le diagnostic était sans appel : diverticulite aiguë. Les petites poches de ses parois intestinales étaient enflammées, certaines sur le point d’éclater. Chaque bonbon se révélait être un piège, rempli de gélatine qui refusait de quitter son corps.

La chambre empestait l’antiseptique et une douce odeur de sueur. On lui mit une perfusion et on lui interdit toute nourriture. Trois jours – seulement des perfusions et le silence. La même question résonnait sans cesse dans sa tête : « Comment peut-on mourir en mâchant du chewing-gum ?»

Son corps luttait. Sa température monta jusqu’à quarante degrés, puis chuta, avant de remonter en flèche. L’infirmière murmura :

« Soyez patient, votre corps se purifie.»

« De quoi ?»

« Des bonbons.»

À un moment donné, il pensa qu’il ne quitterait jamais cette chambre. Ironie du sort : quelqu’un capable de conduire un camion de trente tonnes était incapable de supporter des kilos de gélatine.

Quand la douleur commença enfin à s’atténuer, il réalisa que la peur avait un goût. Pas le métal, comme après un accident, pas le sang, mais le cola bon marché. Le même bonbon qu’il mâchait, croyant acheter du bonheur sur Amazon.

Il sortit de l’hôpital six jours plus tard. Le médecin dit calmement :

« Vous avez de la chance. Généralement, ce genre de cas se termine par une perforation.»

« Que voulez-vous dire ?»

« Les intestins peuvent se rompre.»

« À cause du bonbon ?»

« À cause de la quantité. Même une petite dose supérieure à la normale est toxique.»

Il quitta l’hôpital et, pour la première fois, respira un air sans goût de sucre. Il avait un paquet de chewing-gum dans sa poche — une habitude, un souvenir. Il le regarda, le pressa et le jeta à la poubelle.

Au loin, par la fenêtre, la route grondait. Et soudain, il lui sembla que tout cet incident n’avait rien à voir avec les bonbons, mais avec la soif humaine de réconfort. Nous aussi, nous mâchons — des nouvelles, des divertissements, de l’approbation. Jusqu’à en souffrir intérieurement.

Et l’histoire se termina là où elle avait commencé : dans le silence, dans la cabine du camion, sur la route. Désormais, à côté du volant, il n’y a plus de boîte de Haribo, mais une bouteille d’eau.

Et une pensée qu’il n’oubliera jamais : même les sucreries peuvent être mortelles si on les avale avec trop d’avidité.

Опубликовано в

Добавить комментарий

Ваш адрес email не будет опубликован. Обязательные поля помечены *