La première chose qui frappe, ce ne sont pas les femmes elles-mêmes, mais l’espace entre elles.

L’air semble y vibrer, comme au-dessus d’un bitume brûlant. Au début, on se dit que c’est un simple effet de lumière… une coïncidence. Mais plus on regarde, plus une sensation étrange s’installe : quelqu’un vous observe.
Les sourires sont identiques, les chaînes pendent comme des fils entre deux mondes, et une seule — celle entourée de rouge — rompt l’équilibre.
Son regard n’est pas un hasard.
Il semble prévenir.
Mais… de quoi ?

Lorsqu’on agrandit l’image, un détail glace le sang : elle ne regarde pas l’objectif. Elle regarde à travers. Son regard glisse au-delà de vous, comme si quelque chose se trouvait derrière votre épaule… quelque chose qu’elle voit et que vous refusez encore d’admettre.
Ce n’est pas la peur que l’on lit dans ses yeux, mais une lassitude profonde, comme celle d’une personne qui a déjà tenté d’avertir — encore et encore — et qui sait désormais que ses mots n’arriveront jamais à temps.

Les autres visages, eux, sont troublants. Trop lisses. Trop semblables. Les mâchoires ont la même courbe, la peau le même éclat étrange, artificiel, comme si chaque femme n’était qu’une variation d’un même moule.
Et leurs sourires… figés, étirés, sans chaleur.
Des sourires qui ressemblent plus à des masques qu’à des émotions.

Puis quelque chose dérape.
Sur un agrandissement, la chaîne sur l’une des femmes penche légèrement différemment que sur la photo entière.
Comme si elle avait bougé.
Or la photo est fixe. Immobile.
Et pourtant, cette infime différence donne l’impression d’un mouvement que l’appareil n’aurait jamais dû capturer.

Les ombres, aussi, ne correspondent pas tout à fait.
Même forme, mais pas la même longueur.
Comme si chaque fragment de l’image avait été éclairé par une source différente.
Dans une seule photo, cela n’a aucun sens.

C’est là que quelque chose commence à frissonner dans votre esprit — un son ténu, presque imaginaire.
Un tintement métallique.
Le bruit léger d’une chaîne qui frôle le sol.

Le sentiment d’être observé devient soudain insupportablement précis.
Localisé.
Comme si une présence se rapprochait, lentement, jusqu’à effleurer votre peau.

Vous vous retournez d’un geste brusque.
Personne.

Mais sur la photo…
il manque quelqu’un.

La femme entourée de rouge a disparu.
Son absence forme une sorte de vide, un trou noir minuscule qui attire le regard comme une aspiration silencieuse.
On ne l’a pas effacée.
On l’a emportée.

Et une pensée vous frappe, glaciale :
Et si elle n’essayait pas de prévenir ?
Et si elle montrait simplement la sortie ?

Le silence autour de l’écran paraît alors plus dense. L’air, plus lourd.
Et c’est à ce moment-là que vous voyez une nouvelle ligne apparaître dans un coin de l’image.
Une ligne fine, presque transparente.

Elle dessine lentement… une silhouette.
Pas celle d’une femme.

La vôtre.

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